Des fleurs blanches, de la Tubéreuse et des hommes…
Ces notes florales qui ont été assimilées aux femmes
Saison 3 – Épisode 29
Disclaimer
Écouter le podcast sur les fleurs blanches, la Tubéreuses et les hommes
Une présentation assumée : Misia (qui compare Solar Blossom de Mizensir et Néroli Oranger de Matière Première) et L’Ancien (qui porte Baiser Volé de Cartier) profitent de la sortie de French Flower de Matière Première pour évoquer les fleurs blanches en parfumerie, et surtout la si féminine Tubéreuse, refusée aux hommes.
Donnez de la force à vos gars ! Il nous a fallu 2 espressos et 1 cappuccino pour préparer cet épisode !
Disclaimer
Depuis les années 1970/1980 où le marketing de la parfumerie a explosé, la Tubéreuse et les fleurs blanches n’ont été utilisées quasiment que pour les parfums féminins. De même que la Rose a une certaine période n’évoquait que la femme, ces notes florales si belles ont été interdites aux hommes par souci de bien suivre les tendances de compositions.
Tubéreuse fracassante
Les années 1950 ont été témoins de l’arrivée de Fracas de Robert Piguet. Un parfum à la tubéreuse monumental, réalisé par l’immense Germaine Cellier. Cette œuvre a non seulement frappé de son sceau des générations de femmes parfumées, mais elle a aussi beaucoup contribué à propulser une parfumerie féminine hurlante, toute de fleurs blanches vêtue.
Poison de Dior est d’ailleurs probablement le point d’orgue de cette escalade florale. L’opulence incarnée, signée Édouard Fléchier, a tatoué son époque et à presque interdit la Tubéreuse et autres fleurs du genre à la gente masculine. Particulièrement dans cette période où la Lavande collait de la même manière à la parfumerie masculine.
Toute une époque
Au sortir de cette ère, les fleurs blanches sont restées ancrées d’un seul côté des rayons, excepté pour quelques rares exceptions. Jusqu’à ce nouveau siècle, la Tubéreuse reste donc une note de femme, parfois fatale, parfois garce, parfois distinguée, suivant ce qu’on veut lui faire dire.
La question s’impose donc : et les hommes dans tout ça ?
Mais l’Histoire du parfum est toujours en marche. Même si les merdouilles de notre tendre époque nous font parfois douter, on garde souvent espoir en jetant un œil aux vraies productions créatives.
On a eu la chance de connaître une ère où un certain Serge Lutens a parfois frappé du poing sur la table. Accompagné de l’immense Christopher Sheldrake, il a fait montre d’une force créatrice, d’un Art olfactif poussé à son paroxysme. Faisant parfois s’exprimer la Féminité du Bois, mais rendant aussi la Tubéreuse Criminelle. Ce dernier parfum est un coup de maître qui fait entrevoir l’indice du possible. Oui, une Tubéreuse peut-être autre chose, montrer une facette moins femme, sans renier son âme.
La Tubéreuse trop loin des hommes ?
Et puis, qu’est-ce qu’un parfum si ce n’est une belle odeur, un beau sillage ? Il faut parfois se rendre loin de l’Occident pour remettre la parfumerie à sa place. Loin du marketing, du bourrage de crâne médiatique et de la publicité lobotomisante, les Africains, les Arabes, ou encore les Indiens, se fichent royalement de toute cette mascarade. Ce qu’on regarde avant tout, c’est le sillage.
Tant que c’est beau, et qui pourrait dire que la Tubéreuse ou les fleurs blanches le ne sont pas, on s’en parfume.
Ainsi, même si les plus belles Tubéreuses et nombre de compositions autour des fleurs blanches restent très orientées féminin, on est en droit de se dire « qu’est-ce que j’en ai à foutre » ?!
Le superbe Carnal Flower de Dominique Ropion pour Frédéric Malle présente évidemment toute l’interprétation qu’on pourrait se faire de la garce. Mais pour tout se dire ici, je n’y voit qu’une belle odeur que chacun peut comprendre à sa guise, même si l’on devra, en toute objectivité, devoir slalomer entre les idées toutes faites qu’on nous a implantés dans la tête.
C’est malgré tout la parfumerie de Niche qui a bougé un brin ces codes insupportables. Lutens, puisqu’on a pris cet exemple, a poussé les frontières de ces perceptions. Mais de manière générale, toutes ces marques qui sont restées sur une ligne commerciale non-genrée, ont participé à délivrer l’homme (autant que la femme d’ailleurs) de ses carcans.
Pourquoi donc une femme serait moins femme en portant un Fougère pété de Lavandes ? Pourquoi un homme serait moins viril à porter une belle rose ? Et puis cette Rose n’est-elle pas portée par des hommes bien barbus au Moyen-Orient ?
On est dans le même schéma, la même problématique, avec cette Tubéreuse qu’on veut féminine.
French Flower de Matière Première
Il y a des marques qui se veulent novatrices comme on l’a vu. Matière Première s’inscrit dans cette Niche qui cherche à apporter quelque chose au Parfum. On l’avait vu déjà dans notre interview d’Aurélien Guichard, parfumeur de la Maison, une fragrance autour de la Tubéreuse était à l’étude. De quoi nous titiller, tant la marque a su nous impressionner avec ses premiers lancements.
Ainsi, même si les plus belles Tubéreuses et nombre de compositions autour des fleurs blanches restent très orientées féminin, on est en droit de se dire « qu’est-ce que j’en ai à foutre » ?!
Le superbe Carnal Flower de Dominique Ropion pour Frédéric Malle présente évidemment toute l’interprétation qu’on pourrait se faire de la garce. Mais pour tout se dire ici, je n’y voit qu’une belle odeur que chacun peut comprendre à sa guise, même si l’on devra, en toute objectivité, devoir slalomer entre les idées toutes faites qu’on nous a implantés dans la tête.
C’est malgré tout la parfumerie de Niche qui a bougé un brin ces codes insupportables. Lutens, puisqu’on a pris cet exemple, a poussé les frontières de ces perceptions. Mais de manière générale, toutes ces marques qui sont restées sur une ligne commerciale non-genrée, ont participé à délivrer l’homme (autant que la femme d’ailleurs) de ses carcans.
Pourquoi donc une femme serait moins femme en portant un Fougère pété de Lavandes ? Pourquoi un homme serait moins viril à porter une belle rose ? Et puis cette Rose n’est-elle pas portée par des hommes bien barbus au Moyen-Orient ?
On est dans le même schéma, la même problématique, avec cette Tubéreuse qu’on veut féminine.
French Flower de Matière Première
Il y a des marques qui se veulent novatrices comme on l’a vu. Matière Première s’inscrit dans cette Niche qui cherche à apporter quelque chose au Parfum. On l’avait vu déjà dans notre interview d’Aurélien Guichard, parfumeur de la Maison, une fragrance autour de la Tubéreuse était à l’étude. De quoi nous titiller, tant la marque a su nous impressionner avec ses premiers lancements.
Tubéreuse croquante et lactée
La maison Matière Première s’est donc attaquée à cette mythique fleur, féminine par excellence. Aurélien Guichard s’y attèle en la faisant pousser lui-même, de façon à avoir la plus pure qualité et en en sortant deux types de matières : un absolu et un enfleurage, d’une qualité indiscutable.
Depuis trois ans Matière Première procède donc à l’exploitation de la Tubéreuse dans ses champs vers Grasse. L’utilisation de l’enfleurage, technique très ancienne, abandonnée depuis longtemps et remise au goût du jour, est d’une finesse absolue. Cette technique vient révéler une facette velours, duveteuse, rehaussée à l’aide d’une pointe de Fleur d’oranger. Cette fleur ne sentant qu’en soirée, il s’agit ici pour Aurélien Guichard de reproduire l’odeur d’un champ de Tubéreuses le soir.
Côté compo…
Il a traité celle-ci avec son côté animal et sensuel, l’a assourdie grâce au Gingembre du Nigeria en tête qui vient faire scintiller cette fleur capiteuse. Ce côté épicé modernise la tubéreuse en l’illuminant et en la faisant pétiller.
Arrive ensuite l’huile de feuilles de Thé de Chine qui va donner le côté croquant grâce à cette note de Poire assez présente jusqu’à la fin. La fleur de Tubéreuse va prendre un côté légèrement alimentaire, cette Poire croquante, verte, pas du tout sucrée. Et également, donc, une touche de Fleur d’oranger qui vient magnifier ce côté velours de la Tubéreuse enfleurée.
Cette Tubéreuse a beaucoup de volume au départ, elle est très rémanente, et à une très belle tenue. Son sillage est très classe, fin, légèrement fruité sans tomber dans ce gourmand sucré. Pour une Tubéreuse elle ne prend aucune place façon 80’s.
Tubéreuse lumineuse et câline
On a donc sur peau une tubéreuse très crémeuse, lactée, certains verront un côté Coco, avec un côté fleuri Fleur d’oranger, une Poire croquante dû à la note de Thé. Cette tubéreuse est arrondie sous tous ses angles, aucunement clivante ni criante.
Elle est très lumineuse et câline. Point de Madame ni d’épaulettes, on est bien dans le style minimaliste et moderne de Matière Première.
Un essai transformé que vous pouvez découvrir sur le site de Matière Première. Ça donne espoir et de quoi aborder le printemps de la plus belle manière !
Et vous, les fleurs blanches et la Tubéreuse, vous les verriez sur des hommes ?
Balancez-nous vos impressions !
1 Commentaire
Soumettre un commentaire
Misia
Auteure / Animatrice
Dingue d’olfaction, elle a toujours le nez fourré dans des livres et des sites sur le sujet.
L’Ancien
Auteur / Animateur
Il est la voix lugubre de ce podcast, grande gueule qui aime à secouer l’industrie du parfum. Sur ces notes trempées à l’encre noire, on peut distinguer des listes de victimes enterrées de Paris à Oman. L’Ancien est celui que tu aimes détester, c’est cette note de cœur qui te dérange mais qui rend la composition si singulière.
La Saison 3 du Podcast Parfum La Parfumerie
Tous les épisodes :
Ball-Trap Awards, les lauréats du Millésime 2021
Lauréats Ball Trap Awards 2021, enfin ! C’est toute l’équipe qui a tranché ensemble, avec l’aide du public, pour récompenser les meilleurs !
Appréhender correctement une marque ou un parfum
Appréhender une marque ou un parfum nécessite quelques pré-requis qui nous permettront de de comprendre ce qu’on va découvrir en boutique…
L’impact des classics
Classics de la parfumerie : quel est l’impact des grands parfums du passé, en quoi ont-ils nourri les tendances de notre époque ?
Quelques parfums pour l’été…
Parfums été : Si on se faisait une sélection lourde, avec des fragrances ultra qualitative ? Du Niche et du mainstream au rendez-vous !
Protéger son patrimoine
Protéger son patrimoine en parfumerie n’est pas simple. Ceci dit, Pierre Bourdon a peut-être proposé une solution viable pour les marques…
Petit tour d’horizon de la parfumerie en 2022
Parfumerie 2022, où en est-on, quel virages prend-on ? Les nouvelles sorties sont souvent le signe de nouvelles tendances, parlons-en !
Quand tout tourne rond, ça se sent !
Comparaison de 3 parfums cacao, pour observer le fossé que peut engendrer une marque bien dirigée et une marque de merde : Cartier vs Montale
Tenue correcte exigée
Tenue, puissance, sillage, sont souvent perçus comme un gage de qualité par la masse. Un calcul qui permet de vendre tout et n’importe quoi.
Des parfums charnières ?
Il y a des parfums charnières qui permettent de dépasser nos aprioris sur des matières, des notes qu’on ne supporte pas, de quoi passer le cap de la révulsion…
Propager le vrai parfum
Propager le vrai parfum est un devoir qui incombe à celui qui est bien informé. À chacun son cercle d’influence pour agir pour l’olfaction !
Homme du haut de mes 1m84 pour 82 kg, aujourd’hui j’ose enfin le porter en public, Datura Noir ! On verra bien ce que ça donne 🙂