Saison 1, Épisode 7

Famille Olfactive des Fougères

Écouter le podcast sur les parfums fougères :

Une famille olfactive centenaire

Le père de la famille olfactive des Fougères

En 1882 Paul Parquet créer pour la maison Houbigant le parfum « Fougère Royale » qui marquera l’histoire de la parfumerie. Originairement pensé pour la gente féminine, cet immense parfum deviendra une révolution et donnera son nom à une famille olfactive purement masculine.

Fougère Royale surfera sur la mode émergente des Eaux de Cologne, mouvance déclenchée par Napoléon 1er. Ses arômes de coumarine, bois, lavande et géranium, des senteurs qui donnent aux hommes une sensation de propre, l’impression de sortir de chez le barbier. Mais malgré son nom, aucune note de fougère n’apparait dans sa composition.

On retrouve deux styles dans cette famille :

les Orientaux Fougères avec des notes ambrées et épicées,
les Aromatiques Fougères aux notes plus fruitées et d’herbes vertes telles que la sauge, la menthe, le basilic ou encore le thym.

Les fougères vont dans les années 1960 faire partie intégrante de la parfumerie qui se développe à ce moment là. Figures de proue des ventes et des références des grandes marques de l’époque. Les parfums de cette famille sont incontournables.

Parmi les monuments de cette mouvance on trouvait alors :

  • That Man de Revlon
  • L’Eau de Balenciaga
  • Brut de Fabergé
  • Gentilhomme de Weil
  • Drakkar de Guy Laroche
  • Lavande de Lanvin

Les Fougères en 1970

Dans les années 1970 la saga continue même si elle n’est pas au niveau de la décennie précédente. Le fameux Paco Rabanne pour homme de 1973 fait briller alors la famille des fougères d’un superbe halo lumineux.

L’autre opus qui marquera des générations d’hommes sortira en 1980, Drakkar Noir de Guy Laroche. Il est alors présent sur la plupart des étagères des salles de bains des foyers français (et d’ailleurs). Drakkar Noir en est devenu commercialement l’une des plus grandes références de l’histoire de la parfumerie. Son sillage puissant et cuiré est reconnaissable par tout ceux qui l’ont senti une fois, possédant une signature unique.

Deux géants de la famille des fougères

Certains parfums comme Pour Un Homme de Caron ont traversé les ages. Lancé en 1934 il est jusqu’à ce jour la fragrance phare de la marque et reste indémodable, à l’image du Mâle de Jean-Paul Gaultier. Produit en 1995, et probablement entretenu commercialement par ses très nombreux flankers, il reste l’un des parfums préférés des français à travers le temps.

Bullshit 2000

Le parfum fougère fait son grand retour dans les années 2000 avec des sorties comme Fierce d’Abercrombie , One million de Paco Rabanne, Bleu de Chanel, Invictus de Paco Rabanne ou Sauvage de Dior. Les bois prennent la tête des formules pour donner une tenue monstre, mais tristement l’identité du parfum fougère s’en retrouve fortement marquée. Nombre d’entre eux sont classés comme bois aromatiques. Artistiquement, force est de constater que le commerce merdique a pris le dessus définitivement.

Bleu, puis Sauvage, puis Bad de Diesel, puis Y d’Yves Saint Laurent, on en passe et des pires… Ce qui apparait comme étant la descendance moderne de la famille olfactive des fougères n’a aucune personnalité. L’industrie du parfum se voit ainsi produire des photocopies olfactives dont le commun des consommateurs peut à peine faire la différence. Des compositions saturées pour une tenue ininterrompue, mais dont la senteur n’a plus rien de beau, plus rien de riche, plus rien de l’ADN familial.

Tenue et confort

Les parfums fougères, de base, sont puissants et coriaces dans le temps. Ils peuvent être portés en toute saison, conviennent aussi parfaitement aux tenues élégantes et décontractées qu’aux tenues sophistiquées et chics du soir. Cette impression d’être à l’aise en les portant a forcément joué en leur faveur. Le parfum fougère, même s’il a changé d’aspect avec l’évolution de la parfumerie et l’hyper commercialisation de ses produits, reste très prisé des hommes.

Un fougère féminin au secours de la famille ?

C’est avec Libre d’Yves Saint Laurent en 2019 que le fougère repasse discrètement par la case des féminins. Un passage qui nous fait le plus grand bien, puisqu’il respecte ici ses paires et même ses pères du masculin d’antan. Une superbe composition signée Anne Flipo et Carlos Benaim qui nous prouve qu’une famille n’est pas cantonnée à un genre.

Le fougère homme n’est donc plus que l’ombre de lui-même en étant empoisonné par des bois hurlants dans ses formules actuelles. Même si l’on garde espoir, on se demande si on le reverra briller dans nos linéaires ? Nul ne semble vouloir le faire renaître de ses cendres. Qui sait, peut-être qu’avec son blockbuster, Saint-Laurent lui a donné des ailes du côté des femmes ?

Une famille olfactive en perdition

La famille olfactive des fougères est donc probablement la famille qui a le plus perdu son identité. La modernité ne fait pas de cadeau quand il s’agit de business. À l’heure d’aujourd’hui un parfum masculin se doit d’être dans une paternité de Sauvage ou de Bleu, sans aller voir plus loin, plus haut.

Les copies se multiplient comme d’un Bois d’Argent à un Bois d’Iris, dans la courtoisie la plus hypocrite. Les hommes sentent la même chose, un shampooing atroce, mais venant de flacons différents. Comme si les marques s’étaient transmise la formule de head & shoulders par mail.

Torturée par son succès, par l’habitude qu’on se tourne vers elle pour garantir des objectifs, cette famille olfactive nous empoisonne désormais. En attendant qu’une nouvelle mode surgisse, lui permettant de revenir aux sources de son essence, redevenir elle-même, nous n’avons que nos yeux pour pleurer.

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