Parfum et émotions

On a tous pris des claques en sentant certaines créations, et pour des raisons parfois troubles, on est secoué sans même comprendre…

Des gifles on en a pris avec nos parfums ! Je dis bien « nos parfums » parce qu’ils ont non seulement tous fini sur nos étagères, mais aussi parce que d’une certaine manière ils sont nôtres. 

Ils contiennent une partie de nos émotions, quelque part cachés entre les lignes de ces formules diaboliques. Le parfumeur n’a pas cherché à nous viser personnellement, évidemment, mais il nous a ébranlé.

Une simple note, un soupçon d’une matière première nous a frappés, parfois emportés dans des contrées oubliées de notre vie, parfois vers une scène monumentale qu’on a vécu, et même d’autres fois vers des évènements qu’on aimerait vivre.

Ces émotions prouvent bien sûr que n’importe quelle fragrance peut nous prendre par surprise. Au détour d’un rayon homme dans une parfumerie de merde, dans la salle de bain d’une amie, il n’y a ni heure ni endroit. Cette vie que contiennent ces flacons nous renvoie vers notre fragilité.

Est-on si sensible qu’on peut être terrassé par une odeur ? Une simple touche qui nous renvoie dans les jupons de notre mère, dans les bras de notre père, sur les bancs de l’école, ou dans un décolleté inoubliable ! Après tout on l’a bien cherché, on n’avait qu’à pas aller foutre notre mémoire et notre cœur par là.

On nous a enseignés bizarrement que l’odorat était un fonctionnement primaire et qu’il n’était nullement lié au créatif de nos âmes. On a fait des cours de musique (à se suicider), des cours de dessins (stériles), mais jamais rien sur l’olfaction. On aurait pourtant mieux compris ce qui nous arrive face à cet incroyable flacon !

Alors qu’on parle de synesthésie lorsqu’on associe des couleurs aux odeurs, on n’en dit pas autant lorsqu’une musique nous inspire des images. Tout simplement parce qu’on a inclu certains domaines dans les arts et d’autres non. J’ai pourtant croisé un parfum ou deux qui m’ont inspiré des formes, des teintes, au-delà de souvenirs réels, qui m’ont même parfois inspiré des actes. 

Le parfum ne se considère pas sans l’émotion qu’il suscite, c’est pourquoi on dit souvent dans nos épisodes que si certains aiment des références de merde il n’y a rien de grave. Tant que ça les transporte, tant mieux !

Du peu qu’on produit des articles destinés à l’olfaction sur le net, on s’en tient à dire que les odeurs et les souvenirs sont intimement liés. Super ! Mais aller bien au-delà mériterait qu’on s’y penche enfin, avec un discours enfin destiné au grand public.

Le parfum évoque bien sûr notre passé, des instants vécus, mais il peut aussi vous transporter dans l’imaginaire le plus abstrait, dans des fantasmes et des émotions troubles. C’est tout cela que propose une composition, sans même avoir été pensé par son auteur.

Et lorsqu’on se dit qu’on va faire un peu de ménage et foutre dehors quelques parfums, ceux qui sont liés à des émotions intimes ne quitteront jamais nos placards. On ne se sépare pas de soi-même !